Ce mardi soir, la commission des affaires économiques a adopté la proposition de loi que je porte avec la députée Renaissance Annaïg Le Meur, en présence du ministre du Logement.
Trente amendements, détaillés ci-après, émanant de nous rapporteurs comme de nos collègues députés présents ont pu renforcer le texte afin de favoriser l’accès au logement des Français vivant dans des zones en tension immobilière.
Un certain nombre de propositions donnant aux maires des outils d’action pour réguler le nombre de meublés de tourisme dans leur commune ont été adoptées.
Parmi ces outils, nous avons statué en faveur de l’universalisation du numéro d’enregistrement des meublés de tourisme : tout propriétaire devra déclarer en mairie sa volonté de louer un meublé touristique pour obtenir un numéro, cela permettra aux communes et aux services de l’État d’obtenir des données réelles de l’état du parc.
Nous avons également élargi la possibilité de mettre en place une procédure d’autorisation de changement d’usage (autorisation préalable à la location courte durée) à l’ensemble des communes et renforcent son efficacité :
Simplification des difficultés juridiques rencontrées par les communes mettant déjà en œuvre ce dispositif.
Le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) devient une pièce justificative nécessaires à l’autorisation (pour lutter contre la fuite des passoires thermiques vers la location de courte durée).
L’inscription dans la loi des quotas.
Par ailleurs, l’article 2 de la proposition de loi donne la possibilité aux communes ayant plus de 20% de résidences secondaires d’inscrire dans leur plan d’urbanisme que toutes nouvelles constructions devront être des résidences principales. Les maires pourront en outre abaisser le nombre maximum de jours de location des résidences principales à 90 nuitées, contre 120 actuellement.
Le texte prévoit également d’équilibrer la fiscalité des meublés de tourisme et des locations longue durée. La première, très avantageuse, permet actuellement aux propriétaires de bénéficier d’un abattement de 50 à 71% sur leurs revenus. Nous avons, Annaïg Le Meur et moi-même, ainsi souhaité abaisser ces taux à 30%, comme pour la location longue durée (les gîtes, chambres d’hôtes et meublés de tourisme classés en stations de ski continueront de bénéficier d’abattements de 71% ou de 50%).
Notre proposition de loi a été adoptée en commission. Elle sera discutée la semaine du 4 décembre en séance publique avant de poursuivre son chemin au Sénat.
DANS LE DÉTAIL...
1/ Universalisation du numéro de déclaration ou numéro d’enregistrement des meublés de tourisme
Contexte : l’universalisation du numéro de déclaration ou numéro d’enregistrement des meublés de tourisme est une mesure plébiscitée par une grande partie des acteurs rencontrés. Les meublés de tourisme font d’ores et déjà l’objet d’une obligation systématique de déclaration en mairie, mais celle-ci ne fait pas toujours l’objet d’un enregistrement, qui permet de demander des pièces justificatives, dont la liste sera précisée par décret, et d’attribuer un numéro d’identification.
Objectif de la mesure : meilleure connaissance du parc par les collectivités publiques + condition nécessaire pour prendre des mesures de régulation cohérentes et éclairées (pièces justificatives…)
Date d’application : Compte tenu de la charge technique qu’implique la création d’un tel système d’information, qui devra gérer des flux considérables de demandes, la proposition comprend une date d’application reportée dans le temps, qui permettra, avant le lancement, l’élaboration d’une plateforme robuste en mesure de servir l’ensemble des collectivités.
Spécificité : téléservice de déclaration des meublés de tourisme propre à la Corse via la collectivité de Corse (sous-amendement)
2/ Généralisation de l’obligation du DPE pour la location de courte durée
Contexte : Risque de déport des passoires thermiques louées en longue durée vers de la location touristique non soumise au DPE.
Objectif : Les obligations de performance énergétiques s’appliqueront aux locaux loués pour de courtes durées, lorsque ceux-ci font l’objet d’un changement d’usage définitif, ils auront 5 ans pour se mettre en conformité. Pour les locaux loués pour de courtes durées dans le cadre d’une autorisation de changement d’usage temporaire (article L. 631‑7-1 A), le calendrier et les exigences de performance sont identiques à ceux prévus pour la location au titre de résidence principale.
But : Éviter la fuite de locations long terme vers les meublés de tourisme + objectif de transition écologique.
Spécificité : La mesure n’est proposée que sur le périmètre hexagonal, compte tenu de l’annonce par le Gouvernement d’un report en 2028 de la mise en place d’un diagnostic de performance énergétique opposable dans les territoires ultramarins à l’occasion du comité interministériel des outre-mer du 18 juillet 2023.
3/ Possibilité pour les communes d’abaisser le nombre maximal de jours de locations touristiques des résidences principales dans la limite de 90 jours jusqu’à 120 jours.
Contexte : L’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 relative aux rapports locatifs prévoit que la qualité de résidence principale se perd si le logement est occupé moins de 8 mois par an. La loi a ainsi fixé à 120 jours la durée maximale de mise en location meublée de tourisme. Or, en comptabilisant les jours de week-end et le nombre de jours de congés payés de droit commun, soit un total de 129 jours par an cela apparaît difficilement compatible avec une occupation réelle d’un logement comme résidence principale au moins 8 mois par an. D’autant que pour les rares exceptions qui se justifieraient pour des raisons professionnelles, de santé ou en cas de force majeure, il peut déjà être dérogé à ce délai de 120 jours. Celui-ci est excessif et ne peut satisfaire qu’un usage détourné de l’intention initiale du législateur.
Objectif : possibilité d’abaisser ce seuil entre 90 et 120 nuitées a la main des communes dans le but d’éviter les abus.
Bon à savoir : Cette mesure concerne la location du logement principal entier (non seulement une chambre par exemple).
4/ Améliorer l’effectivité du dispositif de changement d’usage en touchant les bureaux
Contexte : la transformation de logements étant contrôlée via la réglementation du changement d’usage, les investisseurs se tournent désormais vers d’autres types locaux (bureaux, etc…) qui font l’objet de transformations massives en meublés de tourisme.
Objectif : le présent amendement vise à offrir aux communes les plus touchées la possibilité de réglementer d’agir sur la transformation de locaux non concernés par le dispositif de changement d’usage actuel, en meublés de tourisme (ex bureaux…)
5/ Amendes lors des fraudes à l’obligation d’enregistrement des meublés de tourisme
Contexte 1 : Certains loueurs ne procèdent pas à cet enregistrement préalable. Ils sont actuellement sanctionnés par une amende civile, qui s’avère peu efficace compte tenu des délais de procédure, qui permettent aux loueurs d’échapper aux contrôles des agents assermentés plusieurs mois durant
Objectif 1: Il est donc proposé de remplacer l’amende civile par une amende administrative, qui serait prononcée par la commune. Son montant resterait inchangé à 5.000€ maximum.
Contexte 2 : certains loueurs utilisent sur leurs annonces un faux numéro d’enregistrement, que ce soit en inscrivant une suite de chiffre inventées de toutes pièces, ou en recopiant un numéro d’enregistrement existant et appartenant à un autre loueur. D’autres procèdent à leur enregistrement préalable mais fournissent à la commune de fausses informations, que ce soit sur leur identité, l’adresse précise du local ou si celui-ci constitue sa résidence principale. Aucune sanction n’est prévue
Objectif 2 : Il est proposé d’ajouter une amende administrative spécifique, prononcée par la commune, pour sanctionner ces comportements frauduleux, d’un montant de 15.000€.
6/ Élargissement du dispositif de l’autorisation de changement d’usage à toutes les communes
Contexte : Le dispositif de changement d’usage n’est aujourd’hui mobilisable que pour certaines typologies de communes (+200 000 habitants ou par un accord préfectoral). Or cet outil précieux pour limiter l’accroissement des meublés de tourisme est réclamé par de nombreuses communes démunie.
Objectif : Le dispositif est mobilisable automatiquement pour les communes situées en zones tendues. Le dispositif est mobilisable pour les autres communes (en zones détendues) à condition que leur organe délibérant adopte une délibération motivée au regard de la tension immobilière du marché locatif local.
7/ Renforcer le dispositif de changement d’usage en gommant la contrainte de prouver l’usage d’habitation au « 1er janvier 1970 »
Contexte : Dans les contentieux contre les loueurs de meublés de tourisme qui ne sollicitent pas l’autorisation obligatoire de changement d’usage, les communes supportent la charge de la preuve de l’usage d’habitation des logements au 1er janvier 1970. L’état de la documentation, qui date désormais de plus de 50 ans, ne permet pas toujours de rapporter cette preuve au 1er janvier 1970. Cette difficulté s’est accrue avec l’interprétation très stricte que la Cour de cassation a faite de ces dispositions dans plusieurs arrêts en 2020 et 2021, et plus récemment le 7 septembre 2023 (n° 22‑18.101).
Objectif : Renforcer la capacité d’action des collectivités en modernisant et en simplifiant le contrôle du changement d’usage des biens à usage d’habitation. Ainsi, le local ayant reçu une affectation à usage d’habitation depuis le 1er janvier 1970 conserve cet usage, sauf lorsqu’il y a une décision explicite qui est intervenue après pour en changer l’usage. Cette rédaction laisse supporter la charge de la preuve aux communes, mais facilite son administration dès lors que la démonstration d’un usage d’habitation ne doit plus se faire exactement à date du 1er janvier 1970.
8/ Soumettre les personnes morales au régime d'autorisation temporaire des meublés de tourisme
Contexte : le régime d'autorisation temporaire des meublés de tourisme n'inclut pas les personnes morales ce qui ne permet pas aux communes d'imposer certaines mesures aux entreprises ou aux SCI particulièrement actives sur le marché des meublés de tourisme.
Objectif : Soumettre les personnes morales au régime d'autorisation temporaire des meublés de tourisme
9/ Possibilité pour les communes de mettre en place des quotas d’autorisation de changement d’usage pour les meublés de tourisme
Contexte : Certaines communes qui ont souhaité mettre en place un système de quotas du nombre de meublés de tourisme autorisés ont été attaquées devant le juge administratif : c’est notamment le cas de Saint-Malo, dont vos rapporteurs ont auditionné le maire, M. Gilles Lurton, ou encore de La Rochelle, dont vos rapporteurs ont auditionné l’adjointe au maire chargée du logement, Mme Marie Nedellec.
Objectif : Possibilité pour les communes de limiter le nombre d’autorisations de changement d’usage temporaire pour la location de courte durée (quota).
Pour des raisons d’équité dans l’accès au marché et de transparence, le conseil municipal définit alors non seulement le nombre d’autorisations de changement d’usage en meublés de tourisme et les périmètres auxquels il s’applique, mais aussi la durée de l’autorisation, qui doit être la même pour toutes les autorisations, et la procédure de sélection des candidats. Afin de permettre l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché lorsque le nombre maximum est atteint, la délibération doit également assurer des critères d’accès au marché équitables entre les nouveaux entrants et les renouvellements. La limitation du nombre d’autorisations de changement d’usage n’est pas compatible avec le maintien de la délivrance d’autorisations définitives sans compensation au moins équivalente, sauf à entraîner une rupture d’égalité injustifiée entre les unes et les autres.
10/ Mise en place d’une attestation sur l’honneur produite par le loueur du meublé touristique attestant la compatibilité de son activité avec les règles de sa copropriété
Contexte : Aujourd’hui, l’autorité administrative est tenue de délivrer l’autorisation de changement d’usage, alors même que l’activité exercée par le demandeur est interdite par le règlement de copropriété (clause bourgeoise) ou n’a pas été autorisée par le propriétaire (si le demandeur est locataire). Cela donne lieu à l’incompréhension des copropriétaires ou des bailleurs concernés, qui doivent engager eux-mêmes des procédures pour faire interdire l’activité pourtant autorisée par l’administration.
Objectif : permettre à l’autorité administrative de s’assurer préalablement de la régularité de la demande au regard des règles de la copropriété et de l’éventuel bail grâce à une attestation sur l’honneur produite par le demandeur. La production d’une fausse attestation est une infraction.
11/ Amendes aux intermédiaires de location de meublés de tourisme
Contexte : Les intermédiaires de location de meublés de tourisme (conciergerie, agences de gestion locative…) sont soumis aux obligations du code du tourisme, mais ne peuvent être condamnés à l’amende civile de l’article L. 651‑2 du code de la construction et de l’habitation qui vient sanctionner les agissements du loueur uniquement.
Objectif : Rendre les intermédiaires passibles d’une amende civile, au même titre que le loueur.
12/ Création de zones réservées aux résidences principales (nouvelles) dans les documents d’urbanisme
Contexte : Les maires auditionnés ont témoigné leur besoin d’outils renforcés de régulation du nombre de meublés touristiques et de résidences secondaires. Le zonage exclusivement réservé aux résidences principales (nouvelles) constitue une solution intéressante pour les élus.
Objectif : Possibilité, pour l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, d’instituer, dans le règlement, des secteurs où les constructions nouvelles à destination d’habitation sont soumises à une obligation d’usage au titre de résidence principale. Cette capacité ne sera ouverte qu'aux seules collectivités qui connaissent un taux de résidences secondaires supérieur à 20 %.
Il s'agit d'une mesure qui est à la fois proportionnée et strictement subordonnée à la poursuite d’un impératif d’intérêt général : elle ne s’applique qu’aux flux de constructions nouvelles / sa mise en œuvre doit passer par une modification du règlement d’urbanisme / elle est limitée aux seules communes qui connaissent un taux élevé de « secondarisation » du parc (2 fois plus que la moyenne nationale) / elle est justifiée par l’impératif d’intérêt général et ceux qui souhaitent acquérir une résidence secondaire pourront encore le faire dans l’ancien.
Enfin, la rédaction proposée prévoit un dispositif de mise en oeuvre, avec la mention, en cas de mutation ou de contrat de bail, de l’existence de cette servitude.
Spécificités : permet au plan d'aménagement et de développement durable de Corse (Padduc), dans les communes qui ne sont pas couvertes par un PLU exécutoire et qui connaissent un taux de résidences secondaires supérieur à 20% du parc d'immeubles à usage d'habitation, de définir des secteurs à usage exclusif de résidence principale.
13/ Alignement de la fiscalité des locations de courte et longue durée
Contexte : Les locaux de tourisme classés loués bénéficient jusqu’à présent d’un régime forfaitaire d’imposition, dit « micro-BIC » particulièrement favorable par rapport aux logements « nus » louées en longue durée puisque :
>Les locaux classés meublés de tourisme peuvent bénéficier d’une niche fiscale de 71 % jusqu’à 188 700 euros
>Les locaux meublés de tourisme peuvent bénéficier d’une niche fiscale de 50 % jusqu’à 77 700 euros.
>Tandis, que la location « nue » de longue durée bénéficie d’un abattement de 30% jusqu’à 15 000 euros.
Cette inégalité incite les propriétaires à mettre le bien en location de courte durée et tend à priver les habitants de logements à l’année.
Objectif de la mesure : Il est proposé de réviser cette niche comme suit :
> pour les meublés de tourisme classés, l’abattement fiscal en "micro-BIC" est abaissé à 30 % dans le cadre d'un plafond de revenus de 30 000 €. Cette disposition vise à conserver une incitation en faveur du classement.
> pour les meublés de tourisme classés situés en zone rurale (définie comme très peu dense au sens de la grille communale de densité de l'Insee) ou en station classée de sport d'hiver : l'abattement de 30 % est complété d'un abattement supplémentaire de 41 % (soit 71 %) sous réserve d'un chiffre d'affaires plafonné à 50 000 euros ;
> pour les meublés de tourisme non classés, l'abattement est également baissé à 30 %, dans le cadre d'un plafond de chiffre d’affaires limité à 15 000 €.
14/ Suppression de la double déduction des amortissements pour les logements en location meublée non professionnelle dans le cadre du régime réel.
Contexte : Le régime fiscal de la location meublée non professionnelle permet de déduire des amortissements au cours de la location et de ne pas les prendre en compte au moment de la cession dans le calcul de la plus-value. Au cours de la location, on considère que le bien se dégrade et donc qu’il perd de la valeur ce qui justifie la déduction des amortissements des revenus tirés de la location.
Alors qu’au moment de la cession, on considère que le bien n’a pas perdu de valeur et c’est le prix d’acquisition qui est considéré indépendamment des amortissements déduits
Ce mode de calcul est décorrélé de la réalité économique du bien.
Ainsi, pour un même appartement loué en meublé, acquis à 100 000 euros duquel on a déduit 10 000 euros d’amortissements au cours des années de location et qui est revendu à 120 000 euros :
– les amortissements seront déduits des revenus tirés de la location lorsque celle-ci sera réalisée à titre non professionnel mais ne seront pas réintégrés au moment du calcul de la plus-value de cession. Le contribuable sera imposé sur 120 000‑100 000 euros = 20 000 euros ;
– les amortissements seront déduits des revenus tirés de la location lorsque celle-ci sera réalisée à titre professionnel mais seront réintégrés au moment du calcul de la plus-value de cession. Le contribuable sera imposé sur 120 000-(100 000‑10 000) euros = 30 000 euros.
Objectif : Pour les biens loués à des fins touristiques, les amortissements déduits des revenus de la location sont réintégrés dans le calcul des plus-values de cession.
15/ Information obligatoire du syndic par le loueur d’un meublé de tourisme et affichage dans les parties communes
Contexte : Les troubles causés par les meublés de tourisme sont régulièrement aggravés par l’exercice d’activités illicites (fêtes répétées, mais aussi trafic de drogue, prostitution) dans ces appartements. Au sein des copropriétés, il est rare que les propriétaires souhaitant louer en courte durée, à titre permanent ou occasionnel, informent le syndic de leur souhait. Pourtant, l’impact de cette activité sur l’ensemble de la copropriété rend nécessaire l’information des copropriétaires.
Objectif : Lorsque le propriétaire d’un meublé touristique obtient l’autorisation de louer il doit en informer le syndic et un point d’information le syndic doit mettre à l’ordre du jour de sa prochaine AG un point d’information a ce sujet. Le syndic affiche cette information dans les parties communes de l’immeuble.